« Qui suis-je ? » Un esclave selon les dictats du code noir. Mais l’homme qui pose la question s’adresse à celui qui fût son maître tout en interpellant le lecteur et demande ce qui peut justifier son quotidien : violence, humiliation, souffrance … Le sentiment d’injustice et l’incompréhension lui donnent ce regard noir, plein de détermination farouche et de rage désespérée. Jamais il ne renoncera à ce qui fait de lui un homme : sa liberté.
Voilà un livre d’image pour les plus grands qui pousse à la réflexion (j’attendrais 9 ou 10 ans avant de faire lire ce livre à un enfant). Le thème de l’esclavage est amené de façon nouvelle par le biais d’une narration faite par un esclave qui, à la manière d’un journal intime ou de mémoires, adresse à son bourreau des mots qu’il n’osera jamais lui dire en face. L’histoire est racontée au rythme des souvenirs que se remémore le narrateur. Ce rythme narratif saccadé soutient bien la lourdeur du thème abordé. La calligraphie et la police utilisée enrichit le texte; certains mots ou phrases écrites en gros et en caractères gras mettent l’accent de manière textuelle sur la détresse du narrateur et sur la violence qui lui est infligée. Les illustrations aux tracés grossiers et nerveux, et aux couleurs sombres soutiennent de manière juste la noirceur, tristesse et la violence des faits qui y sont relatés en dotant l’histoire d’une atmosphère visuelle appropriée. La partie fictive de l’album est suivie d’un court dossier explicatif sur le Code noir et les deux parties se complètent bien. À la lisière du fictif et du réel, Un Homme en dit beaucoup, mais pas trop, sur l’esclavage tout en laissant la porte ouverte à la réflexion et à la discussion. Attention: Pour lecteurs avertis!
Auteur(s) / illustrateur(s) : Gilles Rapaport
Maison d’édition: Circonflexe
Année de publication: 2007
ISBN: 9782878334166
Public cible: À partir de 9 ans