Belle est une petite fille sage et étonnante à la fois. Elle croit pouvoir tout faire toute seule comme si elle était déjà une grande personne. Heureusement, Béa, sa grande amie, veille sur elle…
D’un point de vue technique, le livre est super. Les illustrations aux traits ronds et aux tons doux et pâles m’ont beaucoup plu. La narration est fantastique aussi; comme il était intéressant de découvrir ce qui berce les semaines de Béatrice et d’Annabelle un jour à la fois. Et comme il était doux de constater à quel point elles semblaient s’aimer. Cela étant dit, toute la douceur des illustrations et tout le côté paisible de la relation amicale entre les deux personnages contraste avec la violence de leur situation. D’un côté, la petite Annabelle est négligée par ses parents qui sont trop occupés à travailler et à aller à des soirées mondaines plutôt que de s’occuper de leur fille. Annabelle ne semble pas non plus avoir d’amis de son âge. Même si la famille d’Annabelle vit dans le luxe et la richesse monétaire, Annabelle est affreusement seule. C’est donc sans surprise qu’elle développe une amitié avec sa gouvernante, qui se révèle être la seule figure parentale stable de son existence.
D’un autre côté, Béatrice effectue un travail exigeant, pour lequel elle est probablement sous-payée et ne reçoit pas de reconnaissance. On en connaît très peu sur elle. Qui est-elle? Quelle est son histoire? Comment s’est-elle retrouvée à travailler pour cette famille? Est-elle heureuse? Elle travaille 6 jours sur 7 et vit dans une maison qui n’abrite pas sa famille. Le dimanche, elle va à l’église et le soir, elle regarde deux photo-portaits posés sur sa table de chevet. Qui sont ces gens? Des amis? Une fille? Un frère? Un mari? Où sont-ils? Ou bien est-ce une photo d’elle même, diplômée, mais qui se retrouve quand même à travailler comme femme-à-tout-faire pour une famille de riche? Les auteurs ne nous donnent pas toutes les réponses, et c’est l’une des forces de cet album: quand tout n’est pas dit, le lecteur peut y aller de son interprétation personnelle.
On ne peut ignorer les relations raciales présentes dans cette histoire dont le contexte semble être celui d’après-guerre. Béatrice est noire et gouvernante. Annabelle est blanche et riche. L’album n’aborde pas cet aspect, ni même l’auteur dans sa dédicace en fin de livre où l’on peut voir la véritable Annabelle (l’auteure – Sarah Stewart) et sa gouvernante. Beaucoup de non-dits, donc, dans cet album, qui célèbre davantage la relation entre Annabelle et Béatrice qu’il n’aborde la question de la race, du racisme d’après-guerre et du privilège racial.
La dernière scène du livre m’a touchée. Un jour ensoleillé, Béatrice sauve la vie de la petite Annabelle qui, voulant récupérer un ballon rouge tombé à l’eau, passe à deux doigts de se noyer. Le soulagement ressenti par Béatrice est indéniable, alors qu’elle prend la fillette dans ses bras, heureuse qu’un drame ait pu être évité. Elles s’aiment, oui. De manière naturelle ou par la force des choses. Ou peut-être un peu des deux. Car au final, chacune à leur manière, elles n’ont qu’elles au monde.
Je remercie les Éditions des éléphants de m’avoir offert ce livre.
Auteur(s) / illustrateur(s) : Sarah Stewart & David Small
Maison d’édition: Les Éditions des éléphants
Année de publication: 2015 (2004 pour la version originale)
ISBN: 9782372730068
Public cible: 6 à 9 ans
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Je fouine sur ton blog et je trouve des idées pour mon African American History Month challenge pour 2020 et celui-ci est à la médiathèque alors je pense que je le lirai 😉
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Bonjour Enna ! Ce livre se lit très bien entre 2 « briques », ça change le rythme, surtout si tu fais un challenge ! 🙂 Tu m’en diras des nouvelles !
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