Moi, Calvin

Résumé: Calvin a toujours su qu’il était un garçon, même si tout le monde le voit comme une fille. Un jour, Calvin prend son courage à deux mains et explique à ses parents que dans son coeur et dans sa tête, il est un garçon, pas une fille. Ses parents lui expliquent qu’il y a un mot pour désigner comment il se sent : transgenre. La famille de Calvin est aimante et le soutient, mais comment cela va-t-il se passer à l’école? Ses amis vont-ils l’aimer et le respecter autant que sa famille?

Lectorat cible : 5 à 8 ans

Autrices : Kayla Harren, JR Ford & Vanessa Ford

Édition : Scholastic, 2022

ISBN : 9781443193634

Prix : 14,99$

Appréciation : Il existe peu de livres jeunesse sur la transidentité ayant un personnage principal racisé. Moi, Calvin est l’un des rares albums qui aborde ce sujet. On y rencontre un jeune enfant qui veut être vu tel qu’il est vraiment. Ce livre est un appel au soutien des familles, amis et école des enfants transgenres. Il est intéressant d’être témoin du parcours de Calvin vers l’affirmation de soi. Il n’est pas vraiment question des difficultés que peuvent rencontrer les enfants transgenres dans notre société binaire, mais plutôt du ressenti identitaire de l’enfant. Le parcours du personnage principal est présenté de manière positive et inspire l’espoir et la bienveillance. Lisez cet album sans hésitation; vous y verrez un bel exemple de la force avec laquelle les enfants peuvent briller si on leur en donne la chance. 

L’histoire de ce livre est inspirée de l’histoire familiale des auteurs Vanessa et JR Ford dont le fils est un enfant transgenre. La famille est très impliquée dans le soutien des jeunes trans et non-binaires.

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Les maîtres enlumineurs

Résumé : Tevanne, riche cité, est entre les mains de quatre grandes familles marchandes. La ville doit sa fortune aux secrets de l’enluminure qui a le pouvoir d’agir sur les objets qu’elle recouvre. Sancia Grando a le don de revivre le passé des objets et d’entendre leur enluminure. Elle est engagée pour voler un objet magique qui peut changer l’enluminure et mener la ville à sa perte.

Lectorat cible : 14 ans et plus

Auteurs : Robert Jackson Bennett

Édition : Albin Michel Jeunesse, 2021

ISBN : 9782226441515

Prix : 39,95$

Appréciation : Surprise! Le personnage principal de ce roman est une femme noire. La page couverture, supposé la représenter, est passée complètement à côté. Ce n’est pas la première fois que ça arrive et ça s’appelle du whitewashing: effacer ou remplacer des personnages racisés par des personnages blancs (ici, sur la page couverture). L’auteur Robert Jackson Bennett, un homme blanc, a fait de ses deux personnages principaux des femmes noires (vraiment badass qui plus est!), et l’éditeur francophone a décidé de ne rien laisser paraître sur sa couverture. C’est quand même dommage. Surtout que le roman est vraiment bien écrit, avec un rythme bien soutenu et aucun temps mort. Premier tome d’une trilogie, Les maîtres enlumineurs se termine sur une note qui donne le goût de continuer la série. Il y a aussi le début d’une romance saphique, mais il faudra attendre les tomes 2 et 3 pour connaître où ça s’en va. Je conseille ce roman aux amateurs de science-fiction, de romans avec de la magie et de la technologie, et des personnages féminins forts.

Vous aimerez peut-être : L’enceinte 9, Akata Witch et Horizon, trois romans pour adolescents avec beaucoup d’action et une touche de science-fiction.

Le camping-car de mon papy

Une petite fille remarque que son papy ne part plus à l’aventure comme il avait l’habitude de faire depuis la mort de Grand’pa, son compagnon. Déterminée à lui redonner le sourire et l’envie de voyager, elle a un plan pour remettre en état le camping-car qui dort dans le garage. Un album sur la tolérance, la perte et l’amour.

Quand on parle de diversité en littérature jeunesse et de représentation juste, Le camping-car de mon papy est un excellent cas de figure. Ce livre, c’est d’abord une histoire sur le souvenir, la famille, le deuil et l’amour. Juste ça. Après, on peut mentionner que l’amour perdu dont on parle en est un queer puisque le camping-car de l’histoire était celui d’un papy et de son amoureux avec qui il a beaucoup voyagé. En lisant le livre, on rencontre d’abord la jeune personnage principale qui s’amuse avec son papy et plus loin, ce dernier lui raconte l’histoire de son amour de jeunesse. Le tout est amené très naturellement et sans en faire un plaidoyer pour la cause LGBT+.

Puis, on ne se contente pas de dire que papy est homosexuel, car ce n’est pas la seule chose qui le définit. On s’attarde à ce qui fait de lui un individu unique et ce qui faisait de son amoureux un individu unique. On parle de bonheur et à quel point les deux hommes étaient heureux dans leur petite maison mobile et du sentiment de liberté qu’elle leur procurait. La petite fille donnera un peu d’amour au camping-car pour le remettre en état de marche et créera de nouveaux souvenirs avec son grand-père. Voilà donc une représentation d’une réalité homosexuelle de qualité! Et en plus, l’auteur Harry Woodgate est aussi queer. #OwnVoices! Bravo aux éditions Kimane pour avoir su rendre tangible cette belle histoire qui normalise les familles LGBT+.

Au niveau de la représentation raciale, la petite fille du papy est métissée et l’amoureux perdu de papy est un homme noir. La couleur de peau des personnages ne change rien au récit, mais donne à voir des personnes racisées dans leur quotidien, loin des luttes et discriminations auxquelles elles sont souvent réduites. Chapeau! Ne passez pas à côté de ce merveilleux album!

Coup de coeur!

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Le camping-car de mon Papy
AUTEUR(S) : Harry Woodgate
ÉDITION: Kimane, 2021
ISBN: 9782368088388
PRIX: 21,95$
3 À 7 ANS

Ce livre vous a plu?
Vous aimerez peut-être Julian est une sirène, Derrière les yeux de Billy, deux albums avec un contenu LGBT+ sans que ce soit le sujet principal du livre. Essayez aussi Mes deux mamans à moi, un livre jeunesse sur l’homoparentalité.

Princesse Princesse

Aventurière en devenir, la princesse Amira rencontre la princesse Sadie et la libère de la tour dont elle était prisonnière. À leur grande surprise, elles vont devenir amies malgré leurs différences. Sur les routes du royaume, Sadie et Amira vont joindre leurs forces pour déjouer les plans de la sorcière qui a emprisonné Sadie et l’humilie constamment. Rejoignez Sadie et Amira, deux princesses très différentes, dans leur aventure pour s’accepter telles qu’elles sont et écrire leur propre conte de fées.

D’abord publié en ligne sous la forme d’un webcomic, Princesse Princesse est une bande dessinée pour le lectorat jeunesse qui donne un souffle nouveau au conte traditionnel. La princesse emprisonnée au sommet d’une tour est ici une jeune fille qui ne souhaite pas particulièrement être sauvée par un prince, et c’est plutôt Amira, une autre princesse, qui viendra la secourir, après s’être assurée que la première a réellement besoin d’assistance et souhaite sortir de sa tour.

On sent bien que l’autrice souhaite dénoncer les stéréotypes et remettre en question l’hétéronormativité, mais elle le fait plutôt maladroitement. L’histoire aborde notamment le sujet des relations familiales toxiques. La méchante soeur de Sadie traite cette dernière de pleurnicharde, de grosse et de stupide. Plutôt que d’envoyer promener sa soeur ou, à la limite, dénoncer son manque d’empathie, Sadie dira plutôt qu’elle ne lui laissera « plus jamais [lui] faire croire que c’est une mauvaise chose! » (p. 39). On véhicule donc l’idée qu’il faut s’accepter tel que notre ennemi nous voie. Je me serais plutôt attendue à ce qu’on souligne les forces et qualités de Sadie pour contrebalancer la mauvaise image d’elle que nous donne sa soeur. Ou encore, tourner les défauts lancés comme des insultes en qualités: Ainsi, Sadie ne serait pas pleurnicharde, mais sensible et proche de ses émotions; elle ne serait pas grosse, mais en santé et bien dans sa peau; elle ne serait pas stupide, mais en apprentissage… Bref, j’ai eu un malaise.

De plus, je dois admettre que la trame narrative est somme toute assez mince et manque cruellement de substance. Il y a beaucoup de questions soulevées qui resteront sans réponse. Amira devait être mariée à un prince fortuné par sa famille, mais s’enfuit. Sa famille la recherche-t-elle? Comme s’est-elle débrouillée seule alors qu’elle est âgée de seulement 16 ans? Aussi, je comprend que la soeur de Sadie soit jalouse, mais est-ce suffisant pour expliquer sa grande méchanceté? La famille de Samira sait-elle qu’elle est lesbienne? Comment se fait-il que Sadie et Amira, deux inconnues qui viennent de se renccontrer, finissent pas se marier aussi rapidement et ne sachant presque rien l’une de l’autre? La famille de Sadie n’était-elle pas inquiète de la disparition de leur fille? Pourquoi ont-ils accepté que la soeur l’enferment dans une tour? À noter aussi que le découpage des cases manque de fluidité.

Bon, après, oui, le livre est très très mignon et adorable, les couleurs sont belles. Il y a une fin heureuse comme dans les contes les plus romantiques. On a besoin de plus de livres jeunesse qui disent aux enfants que oui, l’amour c’est aussi entre deux femmes et que non, toutes les princesses n’ont pas nécessairement besoin d’être secourues. Cela dit, j’ai quand même été un peu déçue par ce livre. Je m’attendais à plus. J’ai eu l’impression de lire un brouillon plutôt qu’une version finale.

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Princesse princesse
AUTEUR(S): Katie O’Neill
ÉDITION: Bliss comics, 2020
ISBN: 9782375782125
PRIX: 27,95$
7 ANS et plus

Ce livre vous a plu?
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Jem et les Hologrammes (tome 1): Showtime!

L’adaptation de la série animée du Club Dorothée en comics. Jerrica Benton, alias Jem, est la fille du patron de la maison de disque Starlight. A la mort de ce dernier, elle hérite de la moitié des parts et d’une pension pour orphelines qu’elle gère avec sa soeur Kimber. Face à la malhonnêteté de l’ancien associé de son père et des Misfits, ses chanteuses, Jerrica monte son propre groupe pop-rock.

Je suis trop jeune pour avoir écouté la version originale de Jem & The Holograms à la télé dans les années 80. Je connaissais de nom, bien entendu, mais je ne me suis jamais arrêtée pour l’écouter, ni pour regarder le film sorti en 2015. Mais mes amies plus âgées que moi ne cessaient de me dire que, me connaissant, je devrais adorer la franchise. Des filles qui font de la musique dans un univers éclaté et qui écrasent les stéréotypes de genre, ça devrait me plaire! Et elles n’avaient pas tort! (Merci, les amies! 😉 ) J’ai beaucoup aimé l’univers de ces quatre musiciennes qui tentent de percer dans le domaine. Je les ai trouvées vraiment cool avec leurs costumes, leur maquillage extravagant et leur façon d’être totalement libres.

L’histoire est faite de rivalités, de concours musicaux, d’amitié et d’amour. Le groupe de Jem est constitué d’une blanche timide, d’une lesbienne, d’une grosse et d’une noire. Leurs rivales, les Misfits, est un groupe constitué d’une métisse grosse et lesbienne, d’une noire immigrée du Royaume-Uni, et de deux blanches. J’ai aimé cette diversité raciale, corporelle et identitaire que l’on voit trop peu en littérature jeunesse! Tous ces personnages principaux, chacun dans la vingtaine, ont une personnalité différente et tous pourront se reconnaître en elles. L’histoire ne se déroule pas dans les années 80, mais plutôt de nos jours, avec son lot de technologie et de réseaux sociaux. Je ne saurais dire si cette adaptation déplaît aux fans de première heure, mais pour une personne qui ne connaissait pas du tout l’univers, j’ai bien aimé!

J’ai aussi aimé la palette des couleurs pastel utilisée: le rose bonbon, le bleu pâle, le vert électrique, le jaune canari et le mauve sur fond blanc immaculé. Il y a quelques coquilles au niveau de l’encrage ici-et-là, mais un œil non avisé pourrait ne même pas les voir passer. Bref, j’ai vraiment aimé cette bande dessinée et je continuerai sans doute la série!

Connaissez-vous Jem et les Hologrammes? Aviez-vous écouté la série télé originale? Avez-vous lu l’adaptation BD?

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Jem et les Hologrammes, 1: Showtime!
AUTEUR(S): Kelly Thompson, Sophie Campbell & Maria Victoria Robado
ÉDITION: Glénat, 2017
ISBN: 9782344017715
PRIX: 24,95$
13 ANS ET PLUS

Ce livre vous a plu?
Vous aimerez peut-être le tome 2 de la série intitulé En route pour la gloire. Essayez aussi J’adore ce passage ou Si on était…, deux bandes dessinées avec des personnages lesbiennes et racisées.

J’adore ce passage

Une histoire d’amour simple et bouleversante entre deux adolescentes d’une petite ville américaine. Elisabeth et Rae semblent tout partager: leurs balades en montagne, leur goût pour la musique, leurs rires et leurs doutes. Au fil de leurs échanges, elles se découvrent, se racontent l’une l’autre, s’aiment, se débattent avec l’intensité de leurs sentiments. Par la jeune prodige Tillie Walden, autrice de Spinning (Prix Eisner, 2018) et de Dans un rayon de soleil.

J’ai adoré Spinning et Dans un rayon de soleil, alors quand j’ai vu que l’un des personnages du dernier Tillie Walden était noir, je me suis dit « Yes! Je vais enfin pouvoir en parler sur Mistikrak! » 🙂 Tillie Walden est sans doute mon autrice préférée de bandes dessinées ces temps-ci. J’aime comment elle aborde les thématiques queer, ainsi que son style d’illustration. J’adore les titres parus lors de la vague belge-japonaise nouvelle manga d’il y a quelques années et Tillie Walden a un peu de ce style et de cette sensibilité-là.

L’histoire se raconte par le biais de courts moments croqués çà et là: on apperçoit les adolescentes allongées sur le gazon dans la cour d’une maison de campagne, debout sur le littoral, faisant leurs devoirs dans une chambre, discutant lors d’une froide journée d’hiver, etc. Chaque page agit comme une photographie capturant une idée, une émotion, un échange entre les deux amoureuses. Tillie Walden joue avec la perspective, la grosseur et la hauteur relative entre ses personnages et leur environnement. Ainsi, elles sont allongées sur une montagne, telles des déesses, ou assises sur des maisons comme des géantes.

Avec peu de mots et peu de cases, l’autrice parvient a bien développer ses personnages et à capturer l’éveil du sentiment amoureux entre deux adolescentes lesbiennes. Leur amour se développe timidement et lentement. Elles s’aiment mais ne savent pas comment en parler au monde. On assiste à leurs premiers rapprochements, leurs premières disputes. On n’a pas les détails, mais on n’en a pas besoin non plus. 

Voici ce qu’on sait de l’adolescente noire de l’histoire: Elle déteste sa belle-mère et elle sait qu’elle la déteste aussi. Elle se trouve moche. Elle aime cuisiner. Elle aime beaucoup la musique et est musicienne. Elle est un personnage complexe et imparfait, plein de mystère. C’est elle qui brisera la relation en premier, disant ne plus pouvoir continuer, ne pas être « comme ça », que c’est mal. Et on sent toute sa détresse et sa peine dans ses larmes. Les adolescentes se quitteront et se rapprocheront de nouveau, ne sachant pas comment gérer ses émotions qui les submergent.

J’adore ce passage est une très belle histoire faite de silences, de pauses, de soupirs. Tillie Walden, prodige de la bande dessinée américaine, saisit ici la vérité d’un amour adolescent.

Coup de CŒUR!  

* Lauréat du Prix Ignatz Award for Promising New Talent 2016

J’adore ce passage
AUTEUR(S): Tillie Walden
ÉDITION: Gallimard jeunesse, 2019
ISBN: 9782075129718
PRIX: 24,95$
12 ans et plus

Ce livre vous a plu?
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Julian est une sirène

Le jour où Julian voit passer trois femmes magnifiques habillées en sirènes, sa vie change. Il ne rêve plus que d’une chose, devenir lui aussi une sirène. Mais que va penser sa Mamita ?

Wow, wow, wow! Quel bel album! Déjà, les pages de garde sont magnifiques. Certaines illustrations en pleine page (par exemple, lorsque Julian s’imagine plonger dans l’eau) me donnent envie d’en avoir des formats géants à exploser sur les murs de la maison. Vous auriez dû me voir en train de lire cet album: je passais du « Ohhhh! » au « Waaaaaaah!! » au « Oh là, là, quoooooiiii???? » au « Mais c’est trop beau!!! » Les illustrations pleines de mouvement m’ont fait plonger au fond des océans avec Julian, avec les poissons, les pieuvres, les méduses et les raies de son imagination. J’ai aussi aimé que l’illustratrice ait utilisé un papier brun plutôt que blanc pour ses dessins. Le rendu est très réussi! Et, comme c’est souvent le cas lorsque l’auteur fait aussi les illustrations, le texte et les dessins participent à part égale à la narration du récit.

Au retour d’un avant-midi à la piscine, Julian et sa grand-mère rentrent à la maison. Cette dernière va prendre un bain en disant à Julian de ne pas faire de bêtises. Mais Julian avait été tellement émerveillé par les jolies femmes qu’il a croisées dans le métro sur le chemin du retour, qu’il en profite pour se maquiller, se mettre des feuilles de palmier dans les cheveux et des rideaux autour de la taille pour se faire une robe. Lorsque la grand-mère sortira de la salle de bain et verra son petit-fils, sa réaction sera simplement « Oh. » On peut facilement imaginer que l’excès de féminité de Julian ne lui a pas plu. Mais il n’en n’est rien! Au contraire, elle offre au garçon un collier pour compléter sa tenue. Et c’est ainsi que la petite famille ira se promener dans le quartier, la tête haute, pour rejoindre une parade tout aussi flamboyante et colorée que Julian.

Cet album souligne à quel point il est important d’être soi-même et fier de qui ont est. Il donne aussi à voir un garçon qui explore les concepts de féminité et de masculinité, démontrant au passage que plutôt qu’être fixe, le genre est quelque chose de fluide et de beau. On ne sait pas si Julian aime les garçons ou s’il se découvrira homosexuel, mais ce n’est pas du tout important. Julian est tout simplement un garçon heureux, qui s’exprime via son genre. J’ai adoré!

Coup de cœur!

* Prix Stonewall Mike Morgan & Larry Romans Children’s & Young Adult Literature pour son traitement exceptionnel d’une expérience LGBTQ+

* Prix des libraires du Québec 2021

Julian est une sirène
AUTEUR(S):  Jessica Love
ÉDITION: École des loisirs, 2020
ISBN: 9782211306669
PRIX: 23,95$
4 ans et plus

Ce livre vous a plu?
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Antonin

Antonin Samuel ChampagneS’ils savaient… Cette phrase, c’est toute ma vie. Il y a beaucoup de choses que les gens ignorent à mon sujet. J’ai une famille qui m’aime, des amis, je suis bon à l’école. On dit aussi de moi que je suis un grand artiste. Mon existence est parfaite, semble-t-il. Mais j’en ai eu une autre, avant, avec des parents biologiques qui sont restés dans ma tête, même après mon adoption. Je songe sans cesse à mon père, en colère par ma faute. À ma mère, partie m’acheter un cadeau sans jamais revenir. À ces journées que j’ai passées seul, dans l’appartement, à l’attendre du haut de mes six ans. Je pense à la chance que j’ai eue qu’on ait bien voulu de moi et à tout ce que je dois faire pour qu’on ne m’abandonne pas de nouveau. C’est pourquoi je cache ma douleur. Pour que personne ne sache que je fais des crises de panique ou des cauchemars, parfois même éveillé. Ni ces parents qui me sont tombés du ciel, ni mon frère, ni mes amis. Et surtout pas William, le gars que j’aime, le seul avec qui j’arrive à oublier. Il faut que je garde la tête haute et le passé à l’intérieur. Mais les souvenirs refont toujours surface, et je commence à manquer de force pour les affronter.

Ce roman a été une montagne russe d’émotions ! Antonin, le personnage principal est attachant et on se soucie de lui, de ce qui lui arrive et de sa vie. Il a l’air si réel qu’on a l’impression qu’on pourrait le rencontrer dans la vie réelle; l’auteur se fait totalement oublier pour laisser toute la place à son personnage aux multiples facettes. J’ai adoré ! J’ai eu peur pour Antonin, je me suis inquiétée, j’ai été touchée et j’ai même eu les larmes aux yeux à deux reprises pendant ma lecture. Franchement, chapeau à l’auteur Samuel Champagne, qui d’ailleurs vient de publier son troisième roman dans la même collection, Kaléidoscope, qui se spécialise en littérature LGBT+ (évidement, je vais tous les lire 🙂 ).

Dans le roman, Antonin tombe amoureux de William, un adolescent noir plus âgé que lui. Leur amour se développe tout naturellement. Alors qu’Antonin craint la réaction de ses parents face à son homosexualité, William l’assume totalement. Il vit seul malgré son jeune âge (18 ans) car ses parents n’ont plus voulu de lui après qu’il ait admis son attirance pour les garçons. On décrit William d’abord comme ayant des « cheveux courts, frisés », une « peau foncée » et des « épaules carrées », et Antonin ne manque pas de souligner qu’il est « tellement beau. » (p.35) Cela dit, tout au long du roman, l’auteur donne plus d’information sur le caractère de son personnage plutôt que sur son physique. On sait par exemple qu’il est fan de l’univers Disney, qu’il est débrouillard, qu’il aime le pop art, etc. Tous ces détails donnent de la profondeur à ses personnages. Petite maladresse lorsque l’auteur écrit que William « a les joues rosées malgré sa peau foncée » lors d’un moment intime entre les deux garçons (on se rapelle bien que les personnes noires ne rougissent pas ??!) Cette erreur est courante et me dérange à chaque fois.

Le meilleur ami d’Antonin, Yohan, est aussi noir. Même si on dit en page 36 que la peau de William est « plus foncée que celle de Yohan », on ne découvrira son origine ethnique qu’à la page 311 où Antonin raconte un événement raciste dont a été victime son ami: « Yohan est le seul Noir de l’école et j’aime pas quand les gens disent des mots méchants à cause de la couleur de sa peau. » Non seulement l’auteur n’est pas tombé dans le piège de définir son personnage secondaire dès le début que par sa différence raciale (ce qui est franchement surfait en littérature jeunesse), mais il laisse le temps au lecteur d’apprendre à connaître Yohan, de l’imaginer et de s’attacher à lui, avant de mentionner au passage qu’il est racisé. Et au final, on se dit « Ah, ben tiens ! » et on continue sa lecture, car non, le fait que Yohan soit noir ne change rien au récit. Yohan est noir parce que les personnes noires existent dans la vraie vie et ont des vies normales (Oh ! Scandale ! …*)

* Avez-vous senti mon sarcasme ? 😉

Antonin est un roman fort, réussi, qu’on a du mal à refermer et qui nous habite longtemps après l’avoir terminé.

Coup de coeur !

Je remercie les éditions de Mortagne de m’avoir offert ce livre. 

Auteur(s) / illustrateur(s) : Samuel Champagne
Maison d’édition: Éditions de MortagneBouton acheter petit
Année de publication: 2019
ISBN: 9782896628537
Public cible: Ados.

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Des mensonges dans nos têtes

Des mensonges dans nos têtes1959, en Virginie. C’est l’histoire de deux filles qui croient qu’elles se détestent parce qu’elles n’ont pas la même couleur de peau et qu’elles ne sont pas nées du même côté.
C’est l’histoire de Sarah et Linda qui croient qu’elles se détestent mais c’est aussi l’histoire de l’année où tout va changer parce que les mensonges des autres vont voler en éclats et que les vies, les cœurs de Sarah et Linda vont s’en trouver bouleversés pour toujours…

C’est d’abord le sujet du livre qui m’a interpellé. Une histoire d’amour impossible entre deux adolescentes dans les États-Unis en pleine lutte pour les droits civiques, je n’avais jamais lu quelque chose de semblable auparavant. Le roman débute tout de go lors de la rentrée scolaire. Racisme, insultes lancées à tue-tête, ici scandés par la foule d’élèves blancs (« Un, deux, trois, l’intégration on n’en veut pas ! »), là crachés par des dizaines d’élèves croisant le passage de Sarah, jeune fille noire surdouée intégrant une école pour Blancs. « Sale négresse qui pue! » par-ci, ricanements, dénigrements et déchets lancés par-là… C’est très dur à lire et ça dure près de la moitié du roman. Cela m’a agacé, car même si le contexte historique a permis tant de haine, plutôt que de faire avancer l’histoire, l’auteur consacre plusieurs pages à ses effusions de racisme.

J’ai eu un malaise constant en lisant ce roman. Voilà cette femme américaine, blanche, qui fait parler une personne noire (fictive, mais s’inspirant de personnes ayant réellement existées), et qui semble carburer aux insultes racistes. « Black Twitter », ces afro-américains qui échangent en 140 caractère sur les réseaux sociaux (parfois en étant totalement ignorés par la majorité blanche) n’ont pas manqué de le soulever également. Et ce, pour plusieurs raisons (traduction libre de quelques propos recueillis sur Twitter concernant la version originale du roman, The Lies We Tell Ourselves. Notez que ces propos ne sont pas les miens):

  • Quelqu’un peut-il me dire pour qui a été écrit ce roman ?? V’là 100 pages d’insultes en continu envers les Noirs.

  • Auteurs blancs, écoutez ceci: Quand vous écrivez un livre sur le racisme, votre livre est automatiquement catégorisé comme ayant un « White Gaze » [c’est-à-dire un regard Blanc sur la chose, n’abordant que la vision des Blancs sur le racisme].

  • OH MON DIEU, LADY [c’est-à-dire l’auteure], comment as-tu pu penser que c’était ta place d’écrire ceci ?

  • Je deviens vraiment frustrée lorsque les gens donnent de bonnes critiques à ce livre.

Bref, vous l’aurez compris, les gens étaient plutôt furieux. Que l’on soit d’accord ou pas avec cette colère, cette situation fait réfléchir et mérite qu’on y porte attention. L’idée n’est pas d’interdire les personnes blanches d’écrire sur le racisme ou de créer des personnages noirs dans leurs œuvres. L’idée est pour ces personnes blanches d’être conscientes de leur « blanchitude », de leur regard, de leur privilège. L’idée est aussi de réaliser que pendant que les personnes blanches parlent « pour nous », les médias accordent peu de place aux artistes noirs, et qu’il est difficile de parler pour nous-mêmes. L’idée, enfin, est d’être conscient de trois choses cruciales : QUI parle ? POUR QUI parle-t-on? POURQUOI parle-t-on de ceci ?

L’auteure Robin Talley, ayant eu vent de la controverse entourant son roman, s’est par la suite excusée sur sa page officielle, se disant « reconnaissante à ceux qui ont soulevé ses problématiques » et souhaitant « s’excuser profondemment pour les blessures [qu’elle a] occasionnées ». Elle dit avoir « appris » de cette expérience et prend les points soulevés par ses détracteurs « très, très au sérieux. » Elle ajoute que lorsqu’elle a écrit ce roman en 2010, elle a « fait ses recherches », mais n’a pas « pris un moment de recul pour [se] demander si [elle] devai[t] raconter cette histoire en premier lieu. » Elle semble avoir compris que nonobstant les recherches qu’elle puisse avoir effectuées, son écriture était, par nature, limitée par sa propre expérience.

Oh, well.

Auteur(s) / illustrateur(s) : Robin Talley
Maison d’édition: Mosaic Bouton acheter petit
Année de publication: 2014
ISBN: 9782280338677
Public cible: Ados

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Princesse Nina

Princesse NinaNina est une princesse intelligente, curieuse, gentille et un peu sauvage. Un jour, le roi et la reine décident qu’il est temps de lui chercher un prince. Bien que la princesse ne soit pas du tout d’accord, elle se prête tout de même au jeu. Malgré les qualités de certains de ces princes, pas un seul n’arrive à lui plaire. Le roi et la reine ne savent plus que faire. C’est alors qu’arrive la princesse Melowo et, subitement, la princesse Nina devient terriblement timide… Un conte moderne et amusant au sujet de deux princesses persévérantes et follement amoureuses.

C’est d’abord la couverture qui m’a interpellé dans ce livre. Ladite princesse, Nina, a l’air boudeuse et ennuyée, assise sur son trône royal. Cet image m’a fait sourire car la Nina que l’illustratrice Compiet a dessinée me semblait du même coup terriblement sympathique. Cette histoire m’a beaucoup interpellée! Elle est bien racontée et l’histoire m’a plu. Tout au long du récit, on se demande « mais quel prince réussira à charmer Nina? » pour finalement réaliser que ce ne sera pas un prince, mais une princesse qui fera battre son coeur. Une princesse du Ghana, qui plus est! Je n’avais encore jamais vu ce genre de représentation dans un livre pour enfant. Je l’ai mentionné plusieurs fois sur ce blogue, mais c’est toujours un plaisir de retrouver des personnages noirs dans le rôle de l’amoureuse ou de l’amoureux d’un personnage blanc. C’est assez rare, alors que de plus en plus de couple mixtes se forment en occident.

Petit détail qui m’a déplu: on décrit Nina comme étant « un peu sauvage ». Ces mots sont écrit en caractères gras dans le texte, ce qui laisse penser que ce trait se situe au centre de ce qui la définit. Plus loin, on dit que:

Ses vêtements étaient toujours pleins de taches, les blagues polissonnes du cuisinier la faisaient rire et elle était folle d’équitation.

Mais est-ce assez pour l’affubler de l’épithète « sauvage »? Parce qu’elle aime se salir? Parce qu’elle ne joue pas tranquillement assise avec des poupées? Hum… Bref, le choix de ce mot m’a déplu.

Les deux princesses sont amoureuses et sont heureuses ensemble. Le message est positif, l’histoire est passionnante (les enfants aiment presque tous les histoires de château et de royauté!), les personnages sont attachants, les princes sont rigolos. Un petit bijou qu’il faut vite aller emprunter à sa médiathèque ou bibliothèque de quartier!

Coup de cœur !

Auteur(s) / illustrateur(s) : Marlise Achterbergh
Maison d’édition: Ballon Media Bouton acheter petit
Année de publication: 2013
ISBN: 9789037490664
Public cible: 5 à 7 ans

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